Cent dollars pour un shérif

Une jeune adolescente arrive coûte que coûte à faire condamner l’assassin de son père, grâce à sa détermination sans faille et son art de la négociation qui joue de la carotte (ses dollars âprement gagnés) et du bâton (son avocat). Gamine dans un monde d’hommes, elle sait s’adapter à son environnement, les États-Unis de 1880, où la violence est omniprésente. Au-delà de l’évangile de la richesse, doctrine américaine de l’époque véhiculée par le film, nous pouvons retrouver dans cette œuvre une volonté d’agir et de triompher malgré les obstacles.

Labor improbus omnia vincit

Si le poète latin Virgile avait vu ce film, il l’aurait peut-être résumé par sa citation ci-dessus, un travail acharné vient à bout de tout. Car l’héroïne triomphe des épreuves grâce à sa ténacité. En effet, la jeune adolescente Mattie Ross (Kim Darby), vient de perdre son père assassiné par son contre-maître Tom Chaney (Jeff Corey), et elle aurait pu baisser les bras, la justice ne pouvant aller chercher l’assassin réfugié en territoire indien. Mais elle affronte le monde des adultes, épreuve après épreuve. Elle réussit à engager le marshal fédéral Rooster Cogburn (John Wayne), s’impose à lui pour que sa quête soit menée à bien, tout en s’opposant au jeune Texas ranger Labœuf  (Glen Campbell) qui, lui, veut uniquement capturer le criminel pour la récompense.

Le film regorge de scènes de négociations entre différentes protagonistes, et dont, western oblige, certaines se résolvent à coup de revolvers : Clausewitz aurait approuvé, la guerre étant pour lui la continuation de la politique par d’autres moyens !

Est-ce choquant ? En kung-fu, nous savons que face aux brutes nous devons opposer la force et face aux pervers nous devons opposer la loi. Et que le légisme est un des huit modes de direction possibles lorsque le monde qui nous entoure est troublé, instable et peuplé de gens moralement imparfaits. Mais nous devons garder à l’esprit les sept autres modes !

Pour qui ?

L’adolescente évolue dans un monde violent. Elle triomphe de l’adversité obstacle après obstacle. Cela donne au film l’aspect d’un conte initiatique ou d’un roman de formation, à la différence près qu’elle n’abandonne pas sa vision du monde. Au contraire, son paradigme (manière de voir les choses) se renforce puisque sa foi dans le pouvoir des avocats et des dollars triomphe de ses adversaires.  Ce n’est donc pas un western pour enfants. Les censeurs français de 1969 l’avaient bien compris, en réservant ce film aux plus de douze ans. Comme d’habitude, il devint plus tard « tous publics » en France, marque du peu d’intérêt de protection de l’enfance, tandis que l’Allemagne l’a maintenu au-dessus de 12 ans. (voir imdb.com)

Alors que l’histoire commence par une scène familiale touchante, où le père de famille salue sa femme et ses enfants avant d’aller acheter des poneys avec son contre-maître, elle bascule vite dans le drame. Le meurtre du père, sans être sanguinolent, est réaliste : son employé est saoul, il se fâche, il tire sur son patron sans sommation et lui vole son argent. Cela se passe très vite, comme cela peut se passer en vrai lorsqu’une situation dégénère.
Autre exemple, la scène de la pendaison de trois criminels illustre à mon sens la banalisation de la violence. Cette exécution publique se fait à côté d’un jardin d’enfants où de joyeux bambins s’amusent innocemment aux balançoires.

Qui a le droit de tuer qui ?

Grâce au duo attachant du shérif et de l’adolescente, nous pourrions minimiser la violence de l’époque. Mais cette violence est-elle contenue dans cette époque ou bien est-elle seulement régulée et escamotée dans nos sociétés ?…

Un des messages à peine implicites du film est qu’un contrat écrit et signé engage la personne l’a signé, et qui peut se retrouver en prison et exécuté si elle ne le respecte pas. Et pour attraper ce contrevenant à la loi, et exécuter la sentence d’un juge, il faut des gens d’arme. Toute société légitime une forme de violence, car de la même façon que le corps a un système immunitaire, le corps social en est également pourvu.

Cinéma

John Wayne reçut son seul Oscar suite à ce film. Les paysages sont magnifiques et ajoutent à la qualité du film. Ce film de Henry Hathaway de 1969 a fait l’objet d’une réadaptation par les frères Coen en 2010.

Mots-clés

Genre
#western #drame

Public
#>12

Titre
FRA Cent dollars pour un shérif, ITA Il Grinta, ANG True Grit, TCH Maršál

Scènes violentes
#fusillade #pendaison #mutilation

Dossier
#légisme #ténacité

Thème
#autorité #groupe #motivation #négociation #relations_de_travail #responsabilité #rôle

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