Pourquoi ne pas écrire comme on parle ? À quoi sert donc la ponctuation, ou plus généralement la typographie ? À quoi bon ces virgules, ces points-virgules, ces tirets ? Ne serait-on pas plus efficace sans tout cet héritage un peu poussiéreux ?…
Bien sûr, il y a les raisons avancées par les enseignants de langues : ajouter de la précision, éviter des confusions, avec parfois des anecdotes (P1) où parfois certains perdent la vie faute d’une virgule bien placée.
Mais si nous cherchons un sens plus général, nous pouvons trouver d’autres raisons utiles à la typographie. Elle sert à distinguer la langue écrite de la langue orale. Et alors, est-ce utile ? Confondre les deux, c’est comme confondre la peinture et la musique, mais surtout confondre le permanent et l’éphémère. Si nous prenons quelque chose de durable pour quelque chose de jetable, nous allons le jeter au lieu de le garder : nous allons donc gaspiller.
Pire. Confondre quelque chose d’éphémère avec quelque chose de permanent nous rend capricieux. Pourquoi ? Parce que nous croyons que les personnes ou les choses doivent être en permanence à notre disposition, toujours prêtes pour nous, alors que cela n’est vrai que dans un temps précis.
En nous aidant à dissocier la langue écrite de la langue orale, en établissant une distinction entre la façon d’écrire les choses et la façon de les dire, la typographie nous invite à distinguer l’immobilité (de l’écriture) de la mobilité (de la parole), à dynamiser la pensée. Nous vivions la ponctuation comme un héritage scolaire alors que malgré ses vieux habits, elle nous invite à un renouvellement perpétuel par le jeu de l’alternance entre écrit et oral (je dis cela mais j’écris comme ceci). À y regarder de plus près, ce n’est pas cet héritage qui est poussiéreux, c’était notre esprit engourdi que nous avions privé de mouvement.