Imaginer pour apprendre ou apprendre pour imaginer ?

Compte-rendu de la conférence de Frédéric Rava-Reny faite à Toulouse en décembre 2015

Marcel Proust nous éclaire sur la finalité de l’apprentissage avec sa métaphore du petit chardonneret, qui fait exactement ce que font ses parents et leurs parents avant lui. Par contraste, ce que nous transmettons à un enfant sont des acquis à maintenir et à prolonger ou enrichir.

Pourquoi maintenir et prolonger ? C’est que la vie nous invite à cela. Comme tout être vivant, pour rester en vie, nous devons à la fois rester nous-même et nous adapter au changement. Claude Bernard a nommé cela « homéostasie », du grec homéo, même, et stasie, rester (comme dans statique ou statue).

Pour qu’une société demeure vivante, c’est la même chose, elle doit comporter des routiniers et des créatifs. Les routiniers maintiennent la structure sociale, les créatifs la prolongent et lui permet de s’adapter aux changements.

Il y a un frein et un accélérateur.

C’est pour cette raison que, comme le formulait Winston Churchill, la démocratie est le moins pire de tous les systèmes. Car il y a une coexistence entre gouvernement et opposition. Cela évite les erreurs dramatiques comme en Chine où tout opposant est assassiné, exécuté, torturé ou envoyé en camp.

Pour nous, c’est la même chose. Lorsque nous exécutons un geste, il y a les muscles agonistes qui vont dans le sens du geste, et les muscles antagonistes qui en freinant apportent la précision du geste.

Et dans les cinq gestes mentaux de base de l’apprentissage, décrits par Antoine de La Garanderie, c’est la même chose. À part l’attention qui occupe une place centrale, il y a d’un côté les gestes de mémorisation et de compréhension qui permettent de stocker des connaissances, et de l’autre les gestes d’imagination et de réflexion qui permettent de se servir de ces connaissances. L’école nous permet de mémoriser et de comprendre un certain nombre de connaissances, dont nous nous servirons soit à l’identique soit en les adaptant dans la vie, professionnelle, personnelle ou familiale.

Il ne s’agira donc pas de mettre l’imagination au service de l’apprentissage, sauf à viser une société routinière inadaptée à notre époque, mais bien de mettre l’apprentissage au service de l’imagination. L’avenir est ouvert.

Quand j’ai créé, par exemple, l’échelle de compréhension, dans un premier temps, je pouvais croire que l’élaboration de dessin, la manipulation d’objets, le passage par le corps, étaient des moyens de mettre l’imagination au service de l’apprentissage. Mais il s’agit d’exactement le contraire. La vie est loin des écrits et des paroles des salles de classe. La vie est peuplée de personnes en chair et en os (niveau corps), de choses (niveau objet) et nous bombarde d’images, publicitaires ou non (niveau dessin). Savoir donc monter et descendre l’échelle de compréhension, c’est non seulement apprendre en créant, mais en apprenant à créer, se préparer à vivre pleinement.

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