Une langue unique n’est pas sans risque…

En début de matinée, sirotant mon thé, cet article m’a interpelé. En voici un extrait.

Ceux qui sont contraints d’utiliser une langue qui n’est pas leur langue maternelle ressentent sans surprise, une diminution de leur statut au sein de l’organisation. La peur de mal s’exprimer dans la langue véhiculaire les conduit souvent à utiliser des stratégies de contournement qui nuisent à la mise en œuvre de collaborations avec ceux qui parlent couramment la langue de travail. Ces derniers interprètent souvent, à tort, le comportement d’évitement de leurs collègues comme le signe d’un manque de considération à leur égard. Loin de permettre une meilleure coopération au sein de l’entreprise, l’adoption d’une langue véhiculaire, si elle n’est pas bien encadrée, renforce donc les clivages entre les employés.

Julie Battilana, « Imposer l’utilisation d’une langue de travail unique n’est pas sans risque », Le Monde, mardi 24 janvier 2012

Changeons « entreprise » ou « organisation » par « école », « employés » par « élèves » et nous avons une description de la situation scolaire ou pédagogique.

Pour cela il faut ajouter que « langue » se remplacera par « perception », ou « évocation » ou « production ».

Qu’un cours s’adresse uniquement aux yeux des élèves et nous nous retrouverons dans la situation décrite : certains élèves se sentent diminués, redoutent de s’exprimer, se font mal voir de ceux qui se sentent à l’aise avec la perception visuelle.

Cela serait vrai également pour un cours qui s’adresserait uniquement aux oreilles des élèves : ceux qui ont besoin de voir avec leurs yeux se sentent diminués, etc.

Qu’un cours nécessite les évocations visuelles (ou auditives), ou un paramètre davantage qu’un autre, ou l’espace ou le temps, et cela plonge certains élèves dans la même situation.

Quant aux six différentes natures de production, elles sont sans doute ce qui ressemblent le plus à une langue : combien d’élèves se sentent comme dans une langue maternelle quand il s’agit de faire quelque chose à l’écrit, à l’oral, gestuellement, graphiquement, musicalement ou plastiquement. Et combien se sentent comme dans une nation étrangère à leur sens quant on leur demande de faire quelque chose où d’autres excellent…

Alors quelle solution ?

Sans doute celle que le monde de l’entreprise, où règne l’efficience, est en train de découvrir : celle de savoir pratiquer plusieurs langues et surtout de laisser les personnes travailler dans leur langue maternelle, quitte à avoir des traducteurs ou des polyglottes.

Cela nous prendra sans doute des décennies ou des siècles, mais nous pouvons rêver d’une école où chacun aurait l’opportunité de développer ses points forts pour le renforcement de la société dans son ensemble.

Il est des enfants dont l’œil brille quand il s’agit de bouger, mimer ou danser, d’autres de peindre ou de dessiner, d’autres de modeler ou de construire, d’autres de chanter ou de jouer d’un instrument.

C’est dans la reconnaissance de nos talents mutuels que le nôtre trouve tout son éclat.

Dans le ciel, aucune étoile ne concurrence une autre ; au contraire, chacune rehausse l’éclat de l’autre.

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