Sur le film Samsara – Satisfaire mille désirs ou en satisfaire un seul

Conférence à La Teste de Buch le 2 avril 2004

Pistes bibliographiques

Pour ceux qui veulent en savoir plus sur la pensée bouddhiste et la question du désir et de l’amour, je recommande les ouvrages suivants par ordre de lecture :
(1) W. Rahula, Le bouddhisme selon les textes les plus anciens   : une introduction complète au bouddhisme ;

(2)Chögyam Trungpa, Le mythe de la liberté : ouvrage-clé sur la libération ;
(3) Thich Nhat Hanh,  L’esprit d’amour : un grand maître bouddhiste raconte son histoire d’amour ;.
(4) Arnaud Desjardins, Pour une vie réussie, un amour réussi : relation entre amour et recherche spirituelle ;
(5) Daniel Roumanoff, Psychanalyse et sagesse orientale : pour les lecteurs motivés, sur le lien entre sagesse orientale et psychanalyse (la psychanalyse traitant largement de la question du désir).
 

Le vendredi 2 avril 2004, je suis intervenu pour un exposé-débat autour du film Samsara de Pan Nalin, au multiplex de La Teste de Buch, dans le cadre d’une série de manifestation intitulée Regard… d’un autre monde, Inde Tibet, organisée par la marie de La Teste de Buch, la Vie Autrement et l’association Asia.

L’histoire centrale est celle d’un jeune moine d’une vingtaine d’années. Peu de temps après une retraite de 3 ans 3 mois 3 jours, il a le coup de foudre pour une jeune femme de son âge. Pour elle, il quitte le monastère, l’épouse, fonde une famille…
Le sous-titre du film, Satisfaire mille désirs ou en dominer un seul, correspond au questionnement du personnage principal.

Voici différents thèmes, sous forme de questions, que j’ai brossé à grands traits autour de ce film aux images superbes et à la plastique irréprochable.

1) Peut-on satisfaire le désir ?…
Svâmi Prajñanpad, dont je tire ici les propos de Psychanalyse et sagesse orientale (p.23), n’est pas le seul en Orient à préciser que le désir ne peut être satisfait car il est dans la nature même du désir d’être insatisfait.

2) Peut-on dominer le désir (ou quoique ce soit d’autres) ?
Hum, domine-t-on vraiment ou est-on seulement de plus en plus conscient ?… Domination – maîtrise ou bien conscience ?…

3) Comment travailler le désir ?
En l’observant, en observant l’esprit (termes tibétains pour méditation) : en observant comment il apparaît… pour disparaître !
Vouloir le dominer serait l’enfermer et donc continuer à le maintenir « en vie » : lui donner une expression convenable (hors de question d’y répondre de manière impulsive ! ☺) c’est le laisser s’éteindre de lui-même.

3) Est-ce vraiment un désir ?
Nous pouvons nous entraîner à distinguer désir et besoin.
Or, de la même façon que le manger et le boire sont des besoins, le sexe est aussi un besoin, comme le rappelle Confucius, que je cite ici car il apparaît comme un des penseurs asiatiques les plus puritains.
Comparons sur la nourriture : manger est un besoin vital, mais avons-nous vraiment besoin de manger ce plat plutôt qu’un autre ?…
Non, nous désirons cette glace à la Chantilly alors que ce yaourt que nous n’aimons pas satisfera notre besoin alimentaire.
La question que nous pouvons nous exercer à poser face à nous-même est : est-ce un désir ou est-ce un besoin ?…

4) Faut-il être moine pour devenir un être éveillé, un bouddha ?…
Non, le Bouddha historique lui-même précise qu’il y a beaucoup plus de laïcs que de moines à accéder à la bouddhéité .
Je vous renvoie à l’ouvrage fondamental du Révérend Rahula, Le bouddhisme selon les textes les plus anciens, qui reprend ce point et répond également aux différentes questions que l’on se pose quand on rencontre le bouddhisme.

5) Si nous ne pouvons nous libérer du désir aussi simplement qu’en l’assouvissant, où est la liberté ?
Je vous renvoie à l’ouvrage-clé du lama Chögyam Trungpa, Le mythe de la liberté, et vous cite un philosophe occidental, Spinoza, pour alimenter votre réflexion : « On se sent libre quand on ignore les causes qui nous font agir. ».

6) Devenir un Bouddha, est-ce comme accéder au Paradis ?
Nous pouvons envisager une très grande différence.
L’idée de Paradis est souvent vécue par les Occidentaux comme celle d’un état statique, immuable, où rien ne change.
La délivrance ou l’éveil, au contraire, passe par la réalisation que tout est changement.
Or, si tout change, où trouver un endroit où rien ne changerait ?…
L’idée serait donc plutôt de faire un avec le changement permanent : le bonheur ne serait donc pas de trouver un endroit utopique où rien ne viendrait altérer cet endroit paradisiaque, mais d’accepter pleinement la réalité telle qu’elle est : en perpétuel changement.

7) Amour et recherche spirituelle sont-ils incompatibles ?
Arnaud Desjardins commence son livre, Pour une vie réussie, un amour réussi, par le lapsus révélateur de cette dame qui recherche la Connaissance avec un grand A… Comme la plupart des personnes qui croient chercher la libération et recherche en fait le grand amour (du dire de plusieurs maîtres religieux, bouddhistes, hindouistes ou autres). Non, ce n’est pas incompatible. L’un ne peut cependant pas être la compensation de l’autre et inversement, sans risquer la faillite.

8) L’histoire nous montre un moine qui tombe amoureux et se croit obligé de choisir entre être laïc et être moine : est-ce la seule solution ?
Cette interrogation me permet de présenter une toute autre voie, celle empruntée le grand maître bouddhiste vietnamien Thich Nhat Hanh, racontée dans L’esprit d’amour, un merveilleux livre.

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