Dans ses derniers ouvrages, Antoine de La Garanderie affirme l’existence de trois langues maternelles pédagogiques, la tactile, la visuelle et l’auditive. Chacune est reliée à un infini : d’espace, de temps, de mouvement. Chacune est reliée à une vertu théologale. Traditionnellement, chacune de ses vertus dégénère en quelque chose. Il m’a semblé intéressant de trouver quoi, cela montrerait les forces et les faiblesses de chaque langue pédagogique.
La foi dégénère en crédulité, l’espérance se change en folles aspirations vers un quiétisme énervant, et la charité elle même se noie dans un fade et stérile sentimentalisme.
César-Guillaume de La Luzerne, Œuvres oratoires du Cardinal de La Luzerne, évêque de Langres, Sermon IV
J’avais noté cette citation lors d’une recherche, mais je n’ai pas retrouvé l’ouvrage. J’ai trouvé par contre sur internet une citation dans le même esprit, plus longue.
Telle est la malheureuse nature de notre raison, qu’elle tend toujours aux extrêmes. Entraînée par l’imagination, séduite par les passions, poussée par la cupidité, agitée par l’espoir vague d’un bonheur plus grand, elle n’a pas la force de modérer ses désirs, d’arrêter ses pensées, de retenir l’impulsion qu’elle s’est donnée, de se fixer dans un juste milieu. Et cependant c’est dans ce milieu précis que consiste l’exercice des vertus. Les vertus les plus précieuses cessent de l’être quand on les fait sortir des bornes qui les circonscrivent. Leur excès est aussi funeste que leur défaut, et dès qu’elles sont outrées, elles deviennent des vices. La foi dégénère en crédulité, l’espérance en présomption, la défiance de soi même en découragement ,la piété en superstition, le zèle en fanatisme, l’indulgence en relâchement, la sévérité en rigorisme, la clémence en faiblesse, la modestie en pusillanimité, la magnanimité en orgueil, l’économie en avarice, la générosité en prodigalité, le courage eu témérité, la prudence en timidité. Ô mon Dieu, qui pourra arrêter cette raison si bornée, si faible, si violente dans ses emportements ?
Cardinal de La Luzerne, in Collection intégrale et universelle des orateurs sacrés…, Volume 73, pp. 859-860, publié par Jacques-Paul Migne, 1856
César-Guillaume, duc de La Luzerne, né à Paris le 7 juillet 1738 et mort dans cette même ville le 21 juin 1821, est un homme d’Église et un homme d’État français des XVIIIe et XIXe siècles.